Le langage de l’enfant doué de A. Adda

Un excellent article  Le langage de l’enfant doué de A. Adda en date du 17.06.2013 sur le Journal des femmes

A. adda explique si bien en termes « choisis » la pertinence parfois jalousée  de certains enfants doués. Ils paraissent  prétentieux mais ne le sont pas du tout en réalité.  C’est juste « qu’ils parlent bien  » !  Inutile de dire que ce langage souvent peut apporter des quiproquos et des déconvenues, surtout s’ils font de l’humour en plus, qui n’est pas toujours compris…

Je n’ai pas connu trop de « problèmes » de langage, mais  plutôt des questions directes…une anecdote :  Alors que j’attendais des résultats de sang pour savoir si j’attendais le petit troisième, mon fils aîné  me dit devant le petit voisin (12 ans) médusé : « Alors maman, tu es enceinte , ou pas ? »,  ce qui venant d’un enfant de 6 ans peut paraître surprenant !

 

Le langage de l’enfant doué

 

« Les enfants doués ont, semble t-il, un langage bien à eux. Arielle Adda, vous donne les clés pour les comprendre.

Souvent, les adultes se sentent désarçonnés non seulement par les questions innocemment posées par les enfants doués, mais aussi par leurs réponses surprenantes.
Une grille de lecture de cette attitude devient alors nécessaire : on s’étonnera moins, non pas parce qu’on aura compris qu’on peut s’attendre à tout de la part d’un enfant doué, mais parce qu’on saisira pour quelles raisons il a posé cette question, absurde en apparence, ou bien pourquoi  il a répondu de façon bizarre à une question banale et anodine.
Tout d’abord, il y a cette utilisation extrêmement précise du vocabulaire, un mot approximatif jette une ombre de doute sur la signification de la phrase toute entière.
On dit un peu partout que les enfants doués ne comprennent pas l’implicite, ils ont besoin d’entendre, ou de lire, des questions clairement formulées, sans aucune équivoque. A la moindre incertitude dans la formulation, leur imagination sans limites leur fait, sur le champ, entrevoir les multiples interprétations possibles tandis qu’ils se sentent dans l’incapacité la plus totale d’en privilégier une.
Une consigne d’apparence élémentaire peut leur sembler totalement incompréhensible : la maîtresse s’étonne, les camarades s’esclaffent, les parents s’inquiètent et eux-mêmes ne comprennent pas ce qui leur est arrivé. Parfois, il est vrai, cette consigne leur a paru tellement simple qu’elle devait, à coup sûr,  receler un piège : ils se sont donc engagés dans des méandres compliqués à la recherche de ce piège sournoisement tapi derrière cette formulation, trop enfantine pour ne pas être suspecte, et ils se sont définitivement égarés dans un labyrinthe devenu d’une complexité inouïe.

D’ailleurs, quand ils passent un test, il est judicieux de leur rappeler, de temps à autre, qu’il n’y a pas de piège et qu’une réflexion simplement bien menée doit suffire pour leur permettre de parvenir à la réponse attendue. En effet, parfois, on devine les rouages  qui s’enclenchent dans leur cerveau pour les mener sur des chemins tellement tortueux que quiconque s’y perdrait immanquablement.
Rappelons au passage que si tout est toujours trop facile, ils finiront par se lasser de faire tourner à vide ces mécanismes : ils se donnent du mal à la recherche d’un résultat qu’ils imaginent difficile à atteindre et qui se révèle finalement dérisoire.

Ce sérieux, presque exagéré dans l’approche d’une tâche, contraste avec leur goût pour les jeux de mots, les plaisanteries fondées sur des à peu près qui les enchantent.
Le plaisir éprouvé par les enfants doués à rechercher la formulation la plus précise et la plus élégante possible est manifeste, mais, pour eux, il s’agit d’une nécessité : s’exprimer de façon confuse serait trahir leur pensée et donc leur personnalité même. Le mot exact, impossible à remplacer sans fausser l’expression de ses idées, est un impératif absolu. Tout échange verbal doit donc respecter ce souci de précision.
Dès lors, on comprend mieux pour quelles raisons le dialogue est si difficile et comporte vite des malentendus : les autres élèves sont encore étrangers à cette recherche, leur vocabulaire n’est pas suffisamment étendu pour qu’ils aient un grand choix de mots, ils répèteraient plus volontiers des phrases entendues, de façon à se rassurer : déjà proférées par d’autres, elles doivent donc refléter une pensée réfléchie et être aisément compréhensibles…
Infatigable lecteur, l’enfant doué a amassé un vocabulaire considérable et, de surcroît, il n’hésite pas à utiliser un terme littéraire et même précieux : il l’a lu, il n’est donc pas tombé en désuétude, il confère une certaine allure aux phrases.  « A qui ai-je l’honneur ? » demande tout naturellement un enfant occupant accidentellement le poste de standardiste à la maison.
En contrepartie, celui qui s’applique à formuler ses idées avec une telle netteté s’attend à la pareille de la part de ses interlocuteurs et il est stupéfait  lorsqu’il entend un discours cent fois entendu, convenu,  composé de phrases toutes faites et tellement banales qu’elles sont finalement vidées de leur contenu. C’est avec un étonnement profond qu’il entend des adultes proférer avec une conviction qui le surprend chaque fois des phrases répétées à la télévision. Lui qui aime tant parler avec des grandes personnes parce qu’il apprend toujours quelques chose d’intéressant, entend ressasser des mots en séries comme s’il fallait meubler un silence, comme si celui qui parle ne voulait pas prendre le risque d’énoncer une idée trop originale. Tous s’en tiennent prudemment à des lieux communs,  énoncés avec un sérieux mal  assorti aux fadaises  débitées.

Ces idées ressassées risquent de scléroser l’esprit : l’écart entre le discours propre à l’enfant doué et celui de son environnement se creuse parfois de plus en plus : on ne comprend pas ce qu’il dit puisqu’on ne s’attend pas à tant de clarté, de pertinence, d’originalité de pensée et aussi d’humour de la part d’un enfant encore si jeune et lui ne saisit pas forcément le sens du discours convenu, formaté pour le niveau de compréhension qu’on attribue à un enfant de son âge.

Ce malentendu risquerait de durer encore de longues années si on ne prend pas la peine d’écouter, sans pour autant tomber  dans une admiration béate, ces phrases tantôt dictées par un cœur généreux, tantôt par une réflexion subtile,  tantôt par une imagination d’une insondable fertilité, toutes qualités évitant l’ennui à l’entourage de ces enfants qu’on doit se garder de ramener à une « norme » dont ils ne cessent de s’écarter pour enrichir encore leur créativité. » A.ADDA

http://www.journaldesfemmes.com/maman/expert/54529/le-langage-de-l-enfant-doue.shtml

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