Texte de Arielle Adda lors du congrès virtuel de la précocité
mai 2011
COMMENT RENDRE PLUS BELLE LA VIE DES ENFANTS DOUES
Arielle ADDA
Intelligence et beauté ont toujours été associées.
Il est évident que seuls des artistes dotés d’un don particulier savent avec bonheur s’approcher au plus près de la perfection. Ils touchent le plus grand nombre, en éveillant des émotions parfois inattendues.
Les enfants doués possèdent une vive sensibilité, qu’on leur reproche assez souvent et qui semblerait les caractériser : on l’assimile à un manque de maturité, sans jamais songer que cette sensibilité tellement développée permet de saisir des faits que d’autres ne voient pas. Jean-Charles Terrassier dit qu’ils entendent de la musique là où d’autres entendent du bruit. Ils sont extrêmement sensibles à l’harmonie sous toutes ses formes.
Ainsi, quand ils ont le courage de persévérer dans leurs efforts, ils se montrent de merveilleux musiciens : au travers de leur instrument, ils peuvent exprimer toute leur âme sans, pour une fois, déchaîner de moqueries; pour d’autres, ce sera des poèmes lyriques, romantiques ou bien des récits parfois épiques, l’extrême leur va bien. On entend des metteurs en scène raconter comment, enfants, ils dirigeaient leurs camarades pour un spectacle destiné à divertir des grandes personnes qu’il ne fallait pas décevoir ; le futur chorégraphe s’occupe de la partie dansée. On est parfois étonné de voir des enfants considérés comme timides et renfermés s’épanouir et donner toute leur mesure lorsqu’ils jouent un rôle et donc qu’ils ne sont plus obligés de se dévoiler. Leur plaisir à faire semblant d’être quelqu’un d’autre leur confère un dynamisme dont l’éclat rejaillit sur le personnage qu’ils incarnent.
Favoriser cette créativité artistique leur assure un bonheur sans cesse renouvelé, même s’ils sont tout de même obligés de peiner et s’ils se plaignent de tant travailler.
Il est toujours bon de familiariser les enfants, tous les enfants, avec les œuvres d’art : plus qu’un autre, l’enfant doué y trouvera un écho à ce désir d’absolu qu’il ressent tout au fond de lui, sans savoir très bien comment l’exprimer. Ne gâchons pas cette sensibilité créatrice par des dessins grossiers, des musiques sans mélodie, des jouets sans grâce.
Très tôt, l’enfant doué sait que l’univers tout entier recèle des merveilles : il admire profondément les raffinements de la nature : il se passionne volontiers pour quelques domaines de prédilection : ce peut être les planètes, les pierres, les volcans, certains animaux, qui n’ont ensuite plus de secrets pour lui : il faut voir avec quel plaisir un enfant parlera de son sujet favori : par exemple, les requins dans tous leurs états font partie de son univers familier, mais ce peut être, de façon plus gênante pour le quotidien des parents, certains insectes attentivement élevés dans une chambre d’enfant qu’on ne s’attend pas à voir transformée en laboratoire, en serre, ou en animalerie abritant plusieurs variétés de rats par exemple, mais on sait que le rat est considéré comme un animal très intelligent.
Le savoir au sens le plus large attire les enfants doués : ils trépignent quand ils sont cantonnés, trop longtemps à leur goût, au seuil des chemins de la connaissance, alors qu’ils savent que de multiples et magnifiques découvertes les attendent : quand un très jeune enfant répond avec un grand naturel qu’un mouton est « un herbivore » il a l’impression que le monde est
ordonné, il y a des catégories englobant tout ce qui existe, on peut donc organiser ses connaissances pour les relier entre elles et les enrichir de cette façon, et aussi pour les retrouver quand on le désire au lieu de garder un souvenir confus et embrouillé de quelques chose qui avait semblé intéressant sur le moment mais qu’on ne s’est pas donné la peine de mémoriser de façon rationnelle.
Les enfants sont enchantés lorsqu’ils peuvent expliquer pourquoi l’hiver est une saison froide, et pour quelles raisons certains animaux préfèrent dormir pendant ce temps-là.
Les lecteurs passionnés, pléonasme s’agissant des enfants doués, nourrissent leur imaginaire de tous les récits qu’ils dévorent. Ils en considèrent les héros comme des amis, des modèles, des guides, ils palpitent en suivant leurs aventures, glorieuses de préférence, sans se lasser des découvertes que permet une lecture assidue. C’est aussi la porte ouverte à tous les rêves. On ne se sent jamais seul quand on se trouve dans la compagnie d’un bon livre. Bien des adultes connaissent encore cette passion qui les entraîne tard dans la nuit…
Pour les enfants qui s’y sentent à leur aise, les joies procurées par les mathématiques sont infinies : chaque découverte les comble. Cet univers d’une logique absolue les ravit, ils y évoluent tout naturellement, manier les nombres permet de multiples combinaisons dans une cohérence rassurante qui les enchante toujours.
J’ai entendu Hubert Reeves dire « les équations d’Einstein sont d’une élégance fantastique » et il ajoutait « j’adorais faire des choses que j’aimais et j’étais payé pour cela ! ». On ne peut mieux définir le plaisir de vivre dans l’univers qu’on s’est choisi.
Ce peut être encore la découverte d’une langue étrangère : c’est alors un jeu sans fin : le vocabulaire peut toujours être enrichi, les expressions propres à la langue sont souvent divertissantes et c’est encore plus amusant lorsque les caractères sont différents : ces enfants, qui ne sont pas toujours spécialement à leur aise dans le graphisme, éprouvent un plaisir infini à tracer des signes possédant un sens. Des passions pour des pays asiatiques sont nées de cette façon-là.
Il ne faut pas négliger de leur procurer un vrai bonheur en leur ménageant quelques moments privilégiés et indispensables avec des semblables : ils vont échanger leurs questionnements, leurs rêves et découvrir qu’ils ne sont pas les seuls à se poser ces questions, à rire des mêmes choses. C’est la meilleure des thérapies.
On voit bien qu’il n’est pas très compliqué de trouver autour de soi des sources de joies pour les enfants doués : une simple encyclopédie les occupera un bon moment, ils possèdent une insatiable curiosité d’esprit, qu’on peut alimenter autant qu’on le désire, en accompagnant ces découvertes de quelques câlins, toujours appréciés et même nécessaires pour ces enfants dont l’envergure intellectuelle leur permet d’entrevoir les merveilles de l’univers, certes, mais aussi ses dangers. Les câlins les rassurent : ils sont encore petits, ils seront protégés longtemps avant de devoir affronter ce monde extérieur fascinant et parfois inquiétant. N’oublions pas l’humour qu’ils manient si bien et si tôt.
Sur ces chemins conduisant à la découverte de la beauté sous toutes ses formes, l’enfant doué est un merveilleux compagnon.