Lire et relire ça et là, diffusé en petites touches subversives à mon sens , que les personnes et enfants surdoués pensent différemment me pose question. Qu’est-ce que cela veut dire concrètement? Chacun pense différemment , c’est-à dire que chacun a sa pensée, sa personnalité, sa façon de concevoir les choses et le monde, que l’on soit surdoué ou non. Inculquer aux enfants précoces qu’ils pensent différemment me semble dommageable, voire très dommageable. Si l’on m’avait dit cela après mes tests de QI lorsque j’avais 8 ans , je pense, je suis sûre que cela m’aurait beaucoup angoissée. Ma mère n’a rien dit, rien fait et c’est sans doute une meilleure chose que si elle m’avait dit que je pensais différemment….je crois que cela m’aurait donné une image déformée de moi-même et je n’aurais pas pu être bien avec les autres et avoir des amis. Bien sûr les enfants surdoués ont des réflexions philosophiques (parfois ou souvent), bien sûr ils vont très vite, (parfois ou souvent), bien sûr ils calculent très vite (parfois ou souvent), bien sûr ils ressentent fort les évènements, (parfois ou souvent). Leur éducation n’est pas simple, mais si on leur inculque cette idée d’état de différence extrême de pensée, il sera encore moins simple de les guider dans ce monde qui n’est déjà pas toujours facile pour eux. Dans un article j’ai même lu qu’aujourd’hui leur éducation était pensée sur le même plan que les enfants déficients ou autistes…il faut raison garder…l’éducation des enfants surdoués est mille fois plus facile que ces enfants précités. On ne peut vraiment pas mettre sur le même plan les enfants déficients et autistes et les enfants EIP. Au sujet de la pensée en arborescence , j’ai réécouté très attentivement l’intervention du Pr Michel Habib dans le premier congrès virtuel de la précocité (mai 2011) . La pensée en arborescence est une invention non scientifique, qui est calquée sur les enfants surdoués qui vont mal . Plus précisément : comment étayer une théorie avec des enfants que l’on voit en consultation , c’est-à-dire des enfants qui sont en difficulté , voire en grande difficulté. Il faut bien définir ce que veut dire « mode de pensée différent ». les personnes surdouées hiérarchisent également leurs idées , peuvent avoir un traitement cognitif séquentiel . C’est l’apprentissage des très jeunes enfants qui leur apprend justement à bien « penser », à hiérarchiser leurs idées, à bien s’expliquer.
Je retranscris l’intervention du Professeur Michel Habib , neurologue à La Timone à Marseille au premier congrès virtuel de la précocité (mai 2011).
Neurologie de la précocité intellectuelle
« Résumé du point de vue scientifique sur les particularités du cerveau des enfants et adultes précoces avec plusieurs méthodes :
Méthodes Electrophysiologiques : Elles montrent que le cerveau des personnes précoces fonctionne plus en cohérence, les différentes parties du cerveau sont probablement plus en relation les unes avec les autres. D’où l’idée au départ d’une intelligence qualitativement différente et d’une intelligence en arborescence qui s’opposerait à l’intelligence standard qui serait une intelligence à succession d’évènements . Mais cela est battu en brèche par l’IRM fonctionnel.
IRM fonctionnel : l’imagerie fonctionnelle cérébrale apporte une contradiction à cette idée en arborescence montrant que certaines zones différaient de façon significative , les zones frontales et pariétales.
Comparaison de deux groupes : surdoués QI > 130-135 et non surdoués avec l’IRM
La comparaison des zones qui sont impliquées dans la notion de précocité montre une particularité fonctionnelle mais dans le sens d’une accentuation du fonctionnement de certaines zones, frontales et pariétales. Il ne s’agirait pas d’une particularité globale de fonctionnement du cerveau des précoces.
Imagerie morphologique : La substance blanche est constituée de fibres, elle est mesurée finement par la méthode DTI , l’organisation de ces fibres chez les précoces a une plus riche connectivité dans les lobes frontal et pariétal. L’approche négligée mais intéressante est d’observer les patterns des circonvolutions sur la surface du cerveau ; on a montré que dans les familles de précocité intellectuelle mais avec aussi des cas de dyslexie, il existe aussi ces particularités du cerveau morphologiquement différentes ; ces différences d’anatomie du cerveau sont présentes dès la naissance, donc c’est constitutionnel.
Enfant précoces ayant une hétérogénéité de leur profil cognitif, avec des difficultés d’appprentissages associées à la précocité : précocité + troubles dys, (dyslexiques, dyspraxies) est assez fréquente.
M. Noelle Magnier de Nice a montré dans une étude qui utilise les potentiels évoqués, que les enfants qui ont profil inhomogène ont un fonctionnement électrique différent que ceux qui ont un profil homogène. Les profils hétérogènes avec supériorité de la fonction verbale se reposent sur leur hémisphere droit.
Les méthodes IRM sont prometteuses et sous utilisées comme moyen de compréhension du fonctionnement des précoces , l’avenir apportera des informations très importantes. »
Vidéo visible sur http://www.congres-virtuels.com/
En conclusion l’idée que les enfants surdoués et adultes surdoués penseraient différemment , dans tous les sens, de façon anarchique est un concept qui est faux. Ce concept est à manier avec une grande précaution. Ce d’autant plus qu’il ne reflète pas la réalité de nombreuses personnes surdouées.